Pour venir s'installer en Israël, il faut juste désirer ne plus souffrir - “Chers amis, je pense à vous mais j’ai déjà oublié la France. Ma vie là-bas. Mes souvenirs sont comme des photos figées et je dois faire un effort pour leur rendre le mouvement. Je ne tiens même pas à me remémorer ce passé. Je suis ici, maintenant".
Extrait de EN ISRAËL ! CHRONIQUE D'UNE NOUVELLE IMMIGRANTE (2002). En vente sur Amazon (60 pages, 4,99 €)
"Évoquer mes occupations professionnelles parisiennes, ma petite vie en banlieue ouest, mes heures de gloire passée lorsque j’étais apprenti-chercheur en Afrique, mes vingt ou trente déménagements précédents – je n’arrive plus à compter… tout cela me semble incongru et sonner faux. Ce que j’ai « fait » précédemment n’est rien. Evacués les frustrations, les regrets, les remords, les aliénations, les angoisses, les conflits. Disparus ; ils étaient vains. Seules émergent de ce raz-de-marée que je ne décide pas, les émotions : restent les heures bleues, des bulles de bonheur comme autant de cellules qui me constituent. L’apprentissage de l’aptitude au bonheur, une collection de rêves initiatiques inentamés, des visages aimés, l’image de lieux magiques qui m’habiteront toujours.
Il était si simple de tout quitter. La seule vraie richesse, c’est celle que l’on conserve en soi et que l’on peut emporter partout : l’amour que l’on porte à quelques êtres. Ceci, Israël ne pourra jamais vous le ravir.
Voilà ce que je voulais vous dire ces dernières semaines : monter en Israël, c’est passer de l’autre côté du miroir. Cela semble a priori irréalisable, inconfortable et périlleux. Mais lorsque l’on parvient à (se) faire confiance et à faire voler en éclats l’image que l’on a de soi, lorsque l’on pose le pied sur cette terre avec le projet d’y vivre, pour cette terre, pour ce peuple et pour soi, alors tout devient limpide et évident.
J’ai pris quelques raccourcis, c’est vrai : à peine découverte ma judéité, j’ai rejoint la communauté, puis Israël, tant il est vrai que je n’ai pas encore compris, et ne comprendrai sans doute jamais, comment il est possible de se vivre pleinement en tant que Juif sans la Torah et de survivre dans l’environnement peu porteur, voire hostile, à tout le moins contraignant et asservissant de l’Exil.
Le tour de force n’est pas de monter en Israël. C’est d’arriver à demeurer soi-même en Europe, de continuer de s’aimer en n’ayant pas la possibilité d’exprimer pleinement sa nature, ses valeurs, ses espérances, sa conception du monde, vivre selon son calendrier, parmi des peuples qui, depuis 2000 ans, cherchent à nous annihiler. Non ? Vu d’ici, je vous assure que c’est transparent.
Pour venir s’établir en Israël, il faut juste désirer ne plus souffrir.
Je n’ai aucune idée de ce qui m’attend. Je ne sais pas encore comment je gagnerai ma vie ici, sans parler la langue correctement avant des années. Je ne sais pas non plus dans quelle ville j’irai habiter dans six mois après l’oulpan et l’aide financière du gouvernement, quelles rencontres je ferai… Je ne sais rien, mais cela ne m’inquiète pas. Je me sens prête pour tout, forte et mobile. Il y aura même peut-être la guerre. Il sera alors temps d’agir, de mettre les enfants à l’abri, de préserver l’essentiel. Pas maintenant. Maintenant, c’est le présent. L’avenir ne m’intéresse que très peu. Et quoiqu’il puisse advenir, c’est ici, en Israël, que je me sens enfin bien”.
Merci à l’association Alya de groupe qui m'a aidée à monter en Israël et m'a soutenue toute la première année 🙌
Illustration : dans mon ashkoubit à 'Eli, il y a exactement 22 ans, jour pour jour !
Extrait de EN ISRAËL ! CHRONIQUE D'UNE NOUVELLE IMMIGRANTE (2002). En vente sur Amazon (60 pages, 4,99 €)
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